Cérémonie commémorative de la reddition des forces allemandes le 11 mai 1945 – 11 mai 2023, Bouvron
Je vais commencer par quelques dates : 6 juin, 28 juin, 8 mai, 11 mai.
1944 pour les deux premières,1945 pour les deux autres. Et je vais profiter de cette cérémonie pour établir quelques liens à la fois historiques et personnels.
Suite au débarquement du 6 juin 1944, une terrible bataille a opposé en Normandie nos Alliés aux forces allemandes, et il y eut des dizaines et des dizaines de milliers de morts, une suite de combats terriblement meurtriers.
Il se trouve que j’ai grandi en Normandie, là où cette seconde guerre mondiale avait cruellement marqué les esprits et les villes, comme Argentan, détruite à près de 80% par les combats de la libération. Les plages que je fréquentais étaient celles du débarquement, je connaissais très bien la région de Chambois, théâtre de la bataille sanglante de la poche de Falaise, une autre poche, ce « Stalingrad en Normandie » qui a permis aux alliés de vaincre et de repousser les Allemands, ouvrant ainsi la route vers la Seine. Enfant, j’allais y grimper sur les chars américains et polonais je crois, restés pour la mémoire à Mont-Ormel.
Mais bien avant cela, pour revenir en juin 44, trois semaines après le débarquement, à Saffré, où un maquis s’était formé, composé d’hommes de toutes les communes alentour, dont Bouvron, les jeunes regroupés en forêt avaient reçu comme beaucoup d’autres la mission de faciliter la percée des Alliés qui arrivaient de Normandie. Ils y attendaient un parachutage d’armes.
Mais vous connaissez la suite. 70 maquisards y laisseront leur vie, soit en forêt de Saffré le 28 juin 1944, ou bien fusillés le lendemain à la Bouvardière, ou encore abattus un peu plus tard lors d’un accrochage avec l’armée allemande, sans oublier ceux disparus en déportation.
Il faudrait, dans le nord du département, attendre le 4 août pour que Châteaubriant soit libérée. Pierre Gaultier, dernier rescapé de l’attaque du Maquis, disparu il y a 4 ans seulement, s’était ensuite enrôlé au 3ème Bataillon FFI où il avait retrouvé des camarades du maquis. Il s’est ensuite battu sur la poche de Saint-Nazaire.
Parce qu’un peu plus bas qu’à Saffré, la décision d’Hitler de faire de St Nazaire, où se trouvait la base sous-marine, une forteresse et d’y masser des troupes, allait faire durer sur le large secteur d’une quinzaine de communes les combats entre la fin de l’été 44 et le printemps 45. Cette fameuse poche qui s’est refermée sur plus de 100 000 personnes, qui pourront soit quitter peu à peu la zone – ou devront assister à la suite des affrontements meurtriers et parfois subir les exactions, les représailles, les bombardements.
Neuf longs mois avant que le dernier morceau du territoire national occupé par les Allemands soit enfin libéré, 3 jours après la capitulation définitive du pouvoir nazi : la guerre était finie partout, mais il faudrait encore patienter jusqu’au 11 mai pour la reddition officielle des forces allemandes ici à Bouvron.
Ce monument marque la libération de la France entière. La fin de la lutte en Europe contre la barbarie, contre l’idéologie nazie.
En 2023, certains se disent que tout cela est désormais derrière nous, très loin, trop loin.
Or il n’a jamais été aussi important non seulement de se souvenir, et c’est ce que nous faisons ensemble en cette fin d’après-midi, mais aussi de se prémunir. D’abord parce que le conflit en Ukraine nous a rappelé qu’une guerre sur le sol européen était de nouveau une réalité au XXI è siècle. Et aussi en raison de la montée de l’extrême-droite sur notre continent.
Si certains semblent prendre avec légèreté, comme une option, leur arrivée au pouvoir chez nous, ce qui se passe dans notre département devrait nous alerter sur le glissement de notre société vers un retour aux heures les plus noires de notre histoire. A St-Brévin, une poignée de fascistes extérieurs à la commune s’en est pris à plusieurs reprises et de manière criminelle au maire, qui a fini par démissionner.
crédit photos : Mairie de Bouvron