Cumul des mandats : une volonté de retour vers le passé
A l’occasion de la journée d’initiative parlementaire du groupe Horizons, une tentative de retour du « bon vieux » cumul des mandats a eu lieu à l’Assemblée nationale. Derrière une formule louable visant à « renforcer l’ancrage territorial des parlementaires », les député·es de la majorité ont masqué leur conception dépassée de la vie démocratique et leur nostalgie des baronnies locales. Cette proposition de loi était un premier coup de pioche d’un chantier de déconstruction des règles de non-cumul des mandats.
L’interdiction du cumul des mandats de parlementaires et de maire, d’adjoint·e, de président·e ou vice-président·e de conseil départemental ou régional a produit des effets positifs. Avant son application, en 2012, 82 % des député·es et 77 % des sénateurs et sénatrices étaient en situation de cumul de mandats. C’était une spécificité française par rapport à nos voisins européens. L’incompatibilité des mandats locaux et nationaux a permis un important renouvellement des personnes élu·es et une meilleure répartition des responsabilités politiques entre un plus grand nombre de personnes. Le non-cumul a contribué à féminiser nos institutions. Et il a surtout participé à mettre un terme à ce qu’on peut qualifier de dérives clientélistes.
Si des parlementaires considèrent ne pas être suffisamment ancré·es dans leur territoire, c’est d’abord à ces parlementaires de se poser les bonnes questions. La déconnexion qu’on met à toutes les sauces n’est pas une fatalité. Nul besoin de cumuler les mandats pour rester en prise avec la vraie vie et le quotidien : à nous d’arpenter le terrain, à nous de participer à la vie locale, à nous d’être disponibles pour les élu·es locaux, à nous d’aller à la rencontre des habitantes et des habitants pour comprendre les difficultés et les aspirations sociales.
Enfin, le non-cumul vient mettre fin à un mensonge et brise un mythe contre-productif laissant croire que les élus pourraient tout faire, être partout et tout le temps tels des sur-humains. Après ceux qui ne dorment pas, ceux qui ne s’arrêtent jamais !
Cumuler, c’est en réalité contribuer au mythe que les élu·es pourraient tout faire, être partout et tout le temps. Cumuler, c’est faire croire que les élu·es seraient des super héros. Alors que le cumulard, ni pleinement investi dans son mandat parlementaire, ni pleinement investi dans son mandat exécutif local, est plutôt un usurpateur.
Ma vision de la représentation en politique est de faire en sorte de diversifier les profils des élu·es, de permettre à toutes les catégories sociales d’accéder à des responsabilités politiques, de rajeunir et de féminiser nos institutions.
A l’opposé de ce projet délétère pour notre vie démocratique, je suis au contraire très attaché au non-cumul des mandats nationaux et locaux et je défends même une limitation du cumul de mandats dans le temps.
Alors que la défiance des citoyennes et des citoyens envers les institutions et leurs représentant·es politiques est élevée, revenir sur le non-cumul des mandats ne ferait qu’aggraver la maladie.