Retour sur l’itinéraire de ma proposition de loi visant à protéger les jeunes de la précarité.
Le contexte préoccupant
Partant du constat de la montée de la précarité aussi bien chez les étudiant-es, les jeunes actif·ve·s ou les jeunes « ni en formation, ni en emploi (NEET) », écoutant les alertes et revendications des organisations représentatives de la jeunesse, réalisant l’impact de la crise du covid et de l’augmentation du coût de la vie, la nécessité de protéger la jeunesse de la précarité devient un enjeu de justice sociale crucial. Un jeune sur deux est pauvre en France. La seule réponse apportée par le gouvernement consiste en des aides parsemées (et insuffisantes !) qui ne permettent pas d’éradiquer cette pauvreté.
La jeunesse se sent méprisée. On la perçoit comme fainéante et naïve. On l’infantilise. Pourtant, elle est pleine de richesses et de revendications. La jeunesse est mobilisée. Et, si on lui donne les moyens d’agir, en lui faisant confiance, elle sera un véritable levier pour affronter les enjeux climatiques et sociaux auxquels nous devrons faire face.
Les origines de la proposition de loi
De ce manque de considération est née en février 2023 la proposition de loi visant à « protéger la jeunesse de la précarité par la solidarité intergénérationnelle ». Après discussions avec les syndicats de la jeunesse, mais aussi avec les acteur-ices locaux (mission locale, étudiant-es, MRJC, etc), deux mesures phares ont émergé : l’extension du RSA pour les jeunes de 18 à 25 ans et la refonte des bourses en repensant les critères d’attribution. Seulement, cette solution, bien qu’ambitieuse, est coûteuse. Nous avons chiffré nos propositions à hauteur de 16 milliards. Nous sommes en capacité de dégager ce budget en réformant la fiscalité de l’héritage. Pourquoi ce choix ? Car l’héritage accentue les inégalités et contribue à la reproduction sociale.
Vous voulez approfondir le sujet? En savoir plus sur cette proposition de loi? Vous la trouverez juste 👉 ici.
Une proposition sélectionnée pour la niche écologiste
Le 7 mars, cette proposition de loi a été sélectionnée pour être au cœur de la niche parlementaire du groupe écologiste. La niche parlementaire qu’est ce que c’est ? Une fois par an, chaque groupe politique dispose d’une journée entière pour soumettre à la discussion et au vote ses propositions de loi. Pour retrouver le contenu de la niche, c’est par 👉 ici
Auditionner les jeunes
La machine est lancée, il faut maintenant défendre et apporter du contenu à cette proposition. Pour ce faire, qui de mieux que les jeunes eux-mêmes ?! Avec ma collègue Sophie Taillé-Polian, nous avons donc auditionné les organisations représentatives de la jeunesse. Une audition représentant le visage multiple de la jeunesse : MRJC, étudiant-es, lycéen-nes, jeunes en dehors des études, etc. Des constats similaires ressortent de ce temps d’échange : les jeunes sont rattaché-es fiscalement à leurs parents, avantage fiscal mais parfois inconvénient personnel, ils et elles héritent parfois… juste de la pauvreté. La précarisation de la jeunesse grimpe. Un filet de sécurité financier est nécessaire. Il doit répondre aux besoins de cette jeunesse multiple. Notre proposition de loi permet cette réponse face à l’urgence.
Le jeunesse mobilisée pour son avenir
Ce début d’année est marqué par le mouvement social opposé à la réforme des retraites, et la jeunesse est au rendez-vous. Solidaire avec ses ainé-es et soucieuse de son avenir, elle s’engage, elle défend ses droits et refuse cette réforme injuste ! A l’occasion d’un rassemblement des étudiant-es et enseignant-es chercheur-euses, j’ai eu la chance de recueillir les ressentis et discours sur la casse des universités.
Il est important de réformer le système universitaire, en conférence à SciencesPo, nous avons pu échanger avec les étudiant-es pour réfléchir à cette refonte.
Mission Locale et Contrat d’Engagement Jeune (CEJ)
Parce que les étudiant-es ne représentent pas tous les visages de la jeunesse, j’ai visité la mission locale de Nozay pour discuter de la réalité des jeunes éloigné-es des études et de l’emploi avec les professionnel-les. L’occasion d’échanger sur le Contrat d’Engagement Jeune, sur ses réussites mais aussi ses insuffisances, comme sa trop faible adaptation à ses bénéficiaires. Donner une aide aux jeunes pour prendre le temps de trouver leur voie, puis un emploi, c’est ce que nous souhaitons. L’aide conditionnée à un temps de travail figé, comme ce qui existe actuellement, ne permet pas beaucoup de souplesse, pas plus que la limite du montant et dans le temps. Ce n’est pas LA solution.
Audition du Conseil Départemental sur l’expérimentation du Revenu Jeunes
Suite aux retours positifs des professionnel-les au sujet du Revenu Jeunes de Loire-Atlantique, une audition avec les fondateur-ices de ce dispositif s’impose ! Les premiers retours sont prometteurs et prouvent la pertinence de la confiance qui permet de mettre en place un véritable droit à un filet qui sécurise et qui ouvre des perspectives. Ce revenu est un dispositif qui complète les manques existants. Seulement deux territoires de France ont mis en place un Revenu Jeunes : la métropole de Lyon et le département de Loire-Atlantique.
Pour en savoir plus sur ce Revenu Jeunes 👉 ici
Question au gouvernement sur la précarité de la jeunesse
A l’occasion des questions d’actualité au gouvernement (QAG), j’ai interpellé la Première ministre au sujet de la précarité chez les jeunes. Du gouvernement, les jeunes ne retiennent que la vieille formule “Sois jeune et tais toi”. Parce que les jeunes se sentent méprisé-es, infantilisé-es et oublié-es, j’ai demandé aux ministres d’écouter sérieusement la jeunesse.
La réponse de Madame S. El Haïry, secrétaire d’état chargée de la jeunesse et du Service National Universel, fut hors sol. Elle a ainsi affirmé que nous instrumentalisions la jeunesse, alors que le gouvernement bâtirait des solutions avec elle. Avec elle, vraiment ? Pourtant la jeunesse s’oppose fortement au Service National Universel (SNU) obligatoire, une mesure portée par le gouvernement. La ministre a poursuivi en revendiquant l’extension du repas Crous à 1 euro pour toutes et tous alors que cette même majorité a refusé de voter cette proposition. Une réponse déconnectée qui met en lumière le refus d’action du gouvernement pour sortir les jeunes de la précarité.
Pour en savoir plus et pour retrouver la vidéo de la QAG, RDV sur le site en cliquant 👉ici
Distribution alimentaire
Le 28 mars, le syndicat l’Alternative (Union étudiante) réalisait une distribution alimentaire devant les fenêtres de l’Assemblée Nationale. Une action forte, visant à montrer la réalité de la précarité étudiante à l’ensemble des député-es. 400 paniers de denrées alimentaires de première nécessité ont été distribués. Cette action a logiquement dérangé, elle a même suscité le mécontentement de certain-es député-es de la majorité qui l’ont qualifiée de “mascarade” et de “mise en scène”. Oui, vous avez bien lu. Pour la majorité, la pauvreté est donc une mascarade ?
Étude en Commission des affaires sociales
Le 29 mars est un grand jour pour notre proposition de loi puisqu’elle a été discutée en commission des affaires sociales. Concrètement, cela signifie que le contenu du texte a été examiné et amendé par les député-es des différents groupes politiques. Les articles qui composent la proposition de lois sont alors réécrits du fait de l’adoption d’amendements. L’ambiance en commission était très tendue. A la nécessité de l’extension du RSA, les députés Renaissance, Les Républicains et du Rassemblement national répondaient : “assistanat”, “valeur travail”. A la solidarité intergénérationnelle par la réforme de la fiscalité de l’héritage ils évoquaient “une solidarité punitive”.
Bref, toute l’artillerie était de sortie. Un raisonnement malheureusement si classique, qu’on avait même prévu un bingo et devinez quoi ? BINGO !
Malheureusement, aucun article de notre proposition de loi n’a été retenu dans le texte final.
Pour retrouver quelques interventions de la commission, cliquez 👉 ici. Vous trouverez le rapport entier des échanges en cliquant 👉 ici
La proposition de loi non-discutée lors de la niche écologiste
Le jeudi 6 avril, le groupe écologiste était à l’honneur puisqu’il était, pour une journée, maître de l’ordre du jour des discussions parlementaires. Au programme, plusieurs propositions de loi devaient être discutées et votées sur des sujets variés : proposition sur l’alimentation et le “bien manger”, une autre sur l’indemnisation des victimes du phénomène du retrait gonflement des sols argileux, ou encore une autre sur l’interdiction des jets privés. Des sujets évidemment denses et sensibles. Finalement, le quatrième texte de l’ordre proposé (notre proposition de loi) n’a malheureusement pas été soumis à la discussion, faute de temps. Pourtant, j’avais prévu un discours pour le défendre, vous pouvez le retrouver en cliquant juste 👉 ici
Le positif dans tout cela
Alors que les étudiant.e.s qui bénéficient de bourses (ou celles et ceux qui aimeraient bien !) attendaient une réforme depuis des mois, non depuis des années, l’annonce d’une revalorisation a été faite par la Ministre de l’enseignement supérieur une heure avant le passage en commission ! Une augmentation annoncée comme historique avec 500 millions, de fait une compensation partielle des trop nombreux-ses exclu-es du dispositif l’an dernier et de l’inflation. Et une réforme annoncée pour l’été. Loin de l’ambition de notre proposition mais nous aurons peut-être contribué à faire avancer le dossier.
Et d’autre part un engagement à prolonger les rencontres, à consolider les liens avec les représentant-es de la jeunesse, à Paris et en circonscription, pour me faire le relais de ses attentes et besoins.
Vous l’aurez compris, malgré le non aboutissement de cette proposition de loi, ma détermination pour défendre la jeunesse et ses revendications est intacte, si ce n’est même encore plus coriace !